Re-tour. Réutilisation adaptative d’une tour dans le contexte zurichois

Kastriot Dragusha

La construction de tours en Suisse a toujours été sujet à de nombreux débats, et ce, depuis son insertion au milieu du siècle dernier. Malgré les expériences hétérogènes qu'a connues le monolithe, l'énoncé théorique a permis d'en identifier les principales limites qui tendent à le marginaliser. En effet, la construction de tours ne répond que partiellement à la question de la densité, elle ne crée que rarement de la plus-value sociale et urbaine, en plus d'être gourmande en matériaux et donc néfaste pour le climat. À ces critiques, s'ajoute le contraste entre les nouvelles tours considérées comme luxueuses et les anciennes comme moroses. Ce dur constat mène, malgré tout, à une potentialité de projet qui consiste à continuer de rêver de hauteur en la reconceptualisant. La réutilisation adaptative des anciennes tours pourrait répondre à l'impact climatique tout en introduisant une plus-value sociale et urbaine. Dans cette continuité, ce projet vise à étudier cette hypothèse en l'expérimentant sur la M-Hochhaus , une tour de bureaux et son socle de parking. Située au Limmatstrasse à Zurich, l'ambition est de désenclaver cette tour et de la redonner au quartier tout en répondant à la crise démographique et aux mutations sociales, dont les typologies en sont les témoins. Le programme s'organise autour du triptyque habitat, enseignement et production, tout en favorisant les relations communautaires et hybrides aussi bien dans l'espace habitable que l'espace de production.

La réutilisation de la tour constitue d'emblée un acte qui respecte les enjeux durables. Néanmoins, quatre conditions préalables ont été définies dans ce projet pour accentuer cette approche. Il y a la conservation de la structure existante, l'interdiction de la démolition au profit de la réutilisation, la conception d'une architecture basée sur l'assemblage et un souci de minimiser les besoins énergétiques, mais aussi la volonté d'offrir des espaces répondant aux mutations sociales et à la démographie zurichoise tout en favorisant les circuits courts.

Dans son ensemble, le projet profite de la politique antérieure de minéralisation des sols afin d'économiser des matériaux tout en redensifiant depuis l'intérieur, évitant ainsi une expansion du territoire. Dans le même souci de réutilisation des ressources, le projet accorde une attention particulière aux aspects d'économie circulaire, afin de favoriser le réemploi des matériaux employés dans le futur, mais également ceux du passé. En effet, l'existant est vu comme une ressource de composantes et de matériaux. Le projet vient effectuer une déconstruction soignée au niveau du socle, pour ouvrir la tour au public, cette ouverture est accentuée par la déconstruction de la façade opaque existante. Ces matériaux serviront par la suite à reconstruire des dalles, à partitionner les intérieurs et à même servir d'éléments de façade. Les nouveaux éléments, notamment pour la façade respectent également l'économie circulaire et permettent grâce au montage à sec des différents éléments préfabriqués, une déconstruction et une réutilisation future. La conception de la façade est également pensée à minimiser les surchauffes en été, grâce aux coursives/balcons ou aux autres éléments saillants dans le socle tout en offrant des gains solaires en hiver. Cette composition permet ainsi un apport de lumière agréable tout en maximisant les liens avec la nature, tant visuellement que physiquement. Enfin, le projet porte une attention particulière à la question sociale. Le programme souhaite favoriser les circuits courts, mais également répondre aux enjeux de la ville de demain. Ainsi, une partie ateliers sous forme de fablab occupe le socle, tandis que la tour accueille des logements sous forme de co-living et co-working. L'intention dans l'ensemble est de réduire les espaces privés pour des espaces communs généreux dans une optique de durabilité et de réponse démographiques.

L'aspect social de la tour combiné au recyclage d'un bâtiment existant à grande échelle prouve que nous devons réutiliser davantage les structures existantes. Ainsi même un objet aussi massif qu'une tour de bureaux obsolète peut être recyclé en une organisation pertinente et répondant aux enjeux de durabilité. Dans le même temps, avec un rez-de-chaussée ouvert, la tour a retrouvé sa liberté et se connecte à son quartier, contribuant à transformer l'ensemble de l'environnement.

 

Team
Professor in charge of the statement:
Corentin Fivet
Educational director:
Corentin Fivet
Professor:
Luca Pattaroni
EPFL Senior scientist:
Maxence Grangeot
Expert:
Mazza Gabriela
Infos
Year:
2023
Period:
Spring
Category:
Master Project
Topic:  
Architecture, Experimentation, Housing, Society, Structure, Environment, Sustainability
Copyright:
CC BY Licence
Theoretical statement

La tour, la fin d'une utopie ?

Permalink
livingarchives.epfl.ch/projects/5864/re-tour-reutilisation-adaptative-dune-tour-dans-le-contexte-zurichois/